A la manière d’une jeune fille, Pastora entre en scène à la suite de ses pairs, les 4 musiciens et chanteurs qui l’accompagnent. Ils s’attablent et commencent percussions et chants. Elle est au centre mais pour autant c’est la musique qui est le personnage principal de cette première scène. Une façon de nous mettre en haleine.
Pastora Galvan est fille de José Galvan et soeur de Israel Galvan. Filliation exceptionnelle pour une danseuse qui ne l’est pas moins. Après le premier moment musical où Pastora appuyée contre la table encourage, accompagne les musiciens aux palmas, elle s’avance ballerines noires aux pieds, vers le tapis placé en avant-scène. C’est pour le moins curieux de voir cette femme, toutes en rondeurs, vêtue d’une sorte de robe-tablier s’apparentant à celles d’écolières d’autrefois, chaussée de ballerines, s’avancer avec détermination vers ce tapis. On perçoit déjà l’humour dont fait preuve Pastora Galvan. Une danseuse flamenca en chaussons, dansant sur un tapis, on a de quoi être perplexe. Mais Pastora Galvan se joue des codes habituels du flamenco, elle nous renvoie aux a priori que l’on pourrait avoir. Elle danse sans bruit (en tout cas pour ce qui est des spectateurs des derniers rangs), avec autant de puissance et de majesté qu’une danseuse portant chaussures à talons et robe à volants. C’est une buleria dont elle nous fait part avec cette première danse. Un hommage à Triana Pura et à la spontanéité des villages. On sent tout de suite que la danse de Pastora Galvan s’inscrit dans la vie, dans l’instant. Il ne s’agit pas d’une danse à la dramaturgie lourde et aux accents verbaux superflus. L’absence des apparats classiques de la danseuse flamenca, nous permet de sentir la puissance, la précision et la grâce avec lesquelles Pastora Galvan compose.
Sa danse est colorée. Son rapport au sol peut parfois rappeler celui de danseurs africains. Avec des lignes dorsales à l’hoizontale. Le rapprochement avec une gestuelle africaine se traduit d’autant plus par ses mouvements de bassin et de hanches qui défient le spectateur. La petite fille s’échappe pour laisser place à une femme à la grâce masculine qui provoque avec humour les esprits trop étroits. Cette grâce masculine fait référence à la puissance et au côté brut avec lesquels elle s’exprime. La légèreté n’a pas de place si ce n’est dans le ton qu’emploie Pastora Galvan. On est admiratif de la dérision qu’elle peut exprimer à travers ses chorégraphies tout en gardant son ancrage certain, dans la tradition du flamenco.
Les dernières scènes du spectacle s’inscrivent de part les costumes et la sensualité de Pastora Galvan (notamment une robe rouge à la longue traîne), dans cette tradition flamenca. Mais encore une fois, c’est avec facéties que s’exprime la danseuse. La traîne devient un objet sexué que l’on peut mener à sa guise. Les moments de danse sont ponctués de passages musicaux où Pastora Galvan sort de scène. Moments un peu longs pour ma part. L’attente se fait longue lorsqu’on saisit dès les premiers pas, tout ce qu’elle peut par son vocabulaire propre et son jeu, nous faire partager comme sentiments et émotions. Le chemin de chorégraphe interprète se fait jour un peu plus. Chemin à suivre attentivement.
Fanny Brancourt – Cour du Palais Royal Paris (juillet 2010)
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