Filiation
Que se passe-t-il lorsqu’une danseuse contemporaine, Claire de Monclin rencontre sur un plateau son fils danseur de break Quentin de Monclin ? C’est la proposition que nous fait la chorégraphe dans Pour 20 ans et pour plus longtemps.
Cette création évoque le rapport entre une mère et son fils, les ponts qui s’opèrent entre eux, à travers le corps mais aussi tout ce qui les sépare. La difficulté de communiquer, est dépassée grâce à la danse. Elle plutôt verticale, à la danse déliée, ancrée comme un pilier, lui dans un rapport au sol plus prégnant, se contorsionnant trouvant des chemins de danse éloignés de ceux de sa mère ; ils tentent de se mettre au diapason. Ils y parviennent parfois trouvent une musicalité commune, puis s’en échappent chacun gardant son identité et ce qui le caractérise. Le dialogue se construit. L’un vient à la rencontre de l’autre et inversement. Des passerelles s’établissent. Le contact se fait parfois dans l’affrontement, dans le jeu mais toujours avec plaisir. Un plaisir lié à la danse. La danse étant ici le moyen d’aller vers, de s’affranchir, de s’émanciper, de grandir avec l’autre, quelque soient les spécificités et les codes qu’elle requiert. Les souvenirs de l’un et de l’autre résonnent alors et font un peu plus écho aux liens que l’on crée avec les siens. Ces moments si précieux où l’on prend sa place, où l’on affirme son identité : « Maman, j’suis breaker » et où l’on conscientise le rôle de l’autre : « C’est l’histoire d’une mère qui n’a jamais cessé de donner ». Nul n’en doutait dirions-nous après avoir vu ce duo de filiation.
Pour 20 ans et pour plus longtemps, est un joli poème d’une mère à son fils, dont sont absents éclats et fulgurances. Etats pourtant souvent présents dans les relations parents/enfants. Au delà, de la relation qui les unit, et de l’émotion que suscite le fait de voir une mère et son fils sur un même plateau, on regrette que les moments d’incommunicabilité comme de partage soient vécus avec si peu d’élan et de véhémence. On s’y projetterait sans doute plus facilement.
Dans la même soirée, était proposé The big message de John Scott. Un solo chorégraphié par John Scott et interprété par Kévin Coquelard, Un jeune danseur aux qualités physiques et théâtrales surprenantes. Danse, parole, jeu se mêlent et créent une pièce complètement loufoque. Entre grands jetés, roulades, grimaces, torsions, chutes… Kévin Coquelard crée une danse complètement démantelée, fonçant tête la première dans les codes habituels. On rit, sourit, souffle de désespoir et d’étonnement, on jubile de voir ce corps suivant des chemins, qu’on pourrait croire désordonnés. C’est sans compter le fil de l’absurde, qu’étire lentement mais avec frénésie et jouissance, le danseur, et avec lequel il relie ces chemins décousus. Prometteur.
Fanny Brancourt, Le Regard du Cygne Paris (Septembre 2014)
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