Quand l’empathie crée la rencontre
Bi-portrait Jean-Yves, part d’un travail mené depuis plusieurs années par Mickaël Phelippeau sur le portrait fixé par une photographie. Le bi-portrait consiste en un échange de vêtements et autre apparat portés par une personne, quel qu’elle soit, et les vêtements (toujours les mêmes) portés par Mickaël Phelippeau. Il se fait dans le cadre de vie ou de travail de la personne rencontrée.
Dans bi-portrait Jean-Yves, le chorégraphe plasticien, pousse cette rencontre un peu plus loin. Le bi-portrait de Jean-Yves, curé à Bègles, commence tout d’abord par un film. Une succession de plans fixes. Au premier plan Jean-Yves, et en arrière plan son entourage, ses fidèles, la nature, le lieu où il exerce son activité. Ce film est une sorte d’introduction, sans commentaire, nous permettant de faire un premier pas vers Jean-Yves. Le deuxième pas, et les suivants nous sont donnés par Jean-Yves lui-même et Mickaël Phelippeau sur le plateau.
Il est question de spectacle, de l’envie d’être regardé, de corps qui s’essoufflent, se lancent des défis et bien d’autres choses encore. La danse semble lointaine et pourtant elle est là. Avec ces questions sur la représentation, qu’on soit sur scène ou dans une église, avec ce déplacement des corps comme une matière vivante capable de créer du lien, parfois même de créer des miracles, cette rencontre improbable entre un danseur et un curé, dégage un souffle incroyable. Les deux interprètes par leur questionnement, leurs jeux de mots, leurs jeux de corps, la poésie qui s’en dégage, nous invitent nous aussi au questionnement. On s’interroge, on rit. Ce qu’ils traversent fait échos. Nous sommes mus et émus par cette rencontre qui part d’une écoute réciproque de ce que chacun vit, et des ponts que l’on peut faire entre les vies de l’un et de l’autre.
A aucun moment bi-portrait Jean-Yves, laisse place à des effets inopportuns, à du verbiage oral ou physique. Tout est simple et donc juste. Nous sommes les témoins d’une rencontre attentive et attentionnée, dont les qualités permettent de comprendre un peu plus l’autre.
Fanny Brancourt – La maison du temps libre – Stains
©Aldo Abbinante & Philippe Savoir