Faut qu’je danse / Daphnis é Chloé – Jean-Claude Gallotta

Là où j’en suis

Faut qu’je danse !, est un petit solo-prologue à la reprise du trio Daphnis é Chloé. Trio qui symbolise des retrouvailles avec le théâtre de la ville puisque cette même pièce y fut jouée pour la première fois en 1982. 

Jean-Claude Gallotta nous chuchote seul sur scène (le texte pend au micro) la genèse de cette pièce Daphnis é Chloé mais pas seulement. Il nous conte et raconte les rapports qu’entretiennent les danseurs entre eux, les déconvenues artistiques lorsqu’une des danseuses (Mathilde Altaraz) se blesse le jour de la première, la longue complicité qui lie le chorégraphe au musicien Henri Torgue, sa rencontre avec Hervé Guibert qui découvre la danse contemporaine.

Faut qu’je danse !, résonne comme un retour aux sources autant qu’une déclaration d’amour à cette danse qui le traverse depuis tant d’années. Aux moments chuchotés, murmurés se mêlent quelques pas de danse. Jean-Claude Gallotta se dit fatigué, son corps n’est plus le même, il a traversé les années, les créations. Le corps d’un être en mouvement ayant vécu.

Sa danse se fait légère sautillante, approximative. On est touché de voir cet artiste s’exprimer en toute sincérité sur son travail et de revenir sur une partie de son parcours. Il se livre et se délivre avec pudeur. On saisit cette insatiable envie de danse quelques soient les années et le travail du temps qu’elles font subir au corps. Cette confession parait, malgré ces qualités sus citées, s’étendre quelque peu. Le prologue devient alors presque un chapitre du trio qui suit, un chapitre un peu trop long.

Fougueuses amours 

L’histoire de Daphnis é Chloé repose sur la fable mettant en scène Chloé épouse du berger Daphnis qui se fait enlever par des pirates.

Jean-Claude Gallotta, pour recréer cette pièce jouée la première fois en 1982 dans ce même théâtre, fait appel à trois jeunes danseurs Nicolas Diguet, Francesca Ziviani (incroyable de vivacité, de grâce et d’espièglerie) et Sébastien Ledig. Trois danseurs pleins de fougue et d’une légèreté incroyables qui se partagent le plateau à vive allure. Les danseurs prennent l’espace, le déplacent avec une rapidité déconcertante. Ils s’attirent et se repoussent comme des aimants s’aimant.  Chloé est partagée entre son berger et le pirate qui la kidnappe. Elle est intrépide, fougueuse. On croit la saisir mais elle échappe sans cesse puis se laisse prendre. Le jeu est permanent. 

C’est une danse jouissive que propose Jean-Claude Gallotta à travers cette création. Une danse ténue qui tout à coup explose à l’image d personnage de Chloé insaisissable. Ce qui fait la force de ce trio, est avant tout la qualité de ses interprètes et la vigueur avec laquelle chacun d’entre eux incarne la partition chorégraphique créée par Jean-Claude Gallotta. Cependant, j’aimerais de temps en temps prendre un temps, voir les danseurs se reposer, pour pouvoir à nouveau repartir de plus belle avec eux. Mais l’effervescence est permanente. Elle garde malgré tout, sa puissance étant donné la présence et la générosité des danseurs.

Fanny Brancourt – Théâtre des Abbesses, Paris (Avril 2011)

©Guy Delahaye